CONFINEMENT ET ANIMAUX
Confinement : Avons-nous le droit de nous plaindre ?
On se plaint de devoir rester confinés depuis quelques semaines. Et si on en profitait pour penser à tous ces animaux qui, eux, sont privés de liberté toute une vie ? Dans les élevages industriels, il n’y a pas de répit pour les animaux.
Depuis plus de dix ans, S.E.A. – Suppression des Expériences sur l’Animal – se rend dans les élevages industriels de poules pondeuses, partout en Belgique, afin de sauver des poules en cage ou au sol de l’abattoir.
Dans les élevages intensifs, ces malheureuses volailles passent toute leur vie dans le meilleur des cas à 9 au m2 et au pire à 13 voire 18 au m2. C’est le cas pour des centaines de milliers de poules pondeuses toujours confinées dans des cages dites « aménagées » disposant d’un « espace de vie » correspondant à une feuille A4 et dont l’univers se limite aux barreaux de leur cage.
Au bout de 18 mois, les poules dites « réformées » sont entassées dans des cageots sur les camions pour être emmenées par dizaines de milliers vers les abattoirs. Celles que nous arrivons à sauver grâce aux nombreuses personnes qui relaient nos appels ne représentent qu’une goutte d’eau dans l’océan mais sont la preuve qu’une prise de conscience citoyenne a lieu.
Les poules ne sont pas les seules à vivre l’enfer quotidien d’un confinement total. Il en est de même pour les poulets, les cochons, les dindes, les lapins….
Dans de nombreuses porcheries industrielles en Europe, malgré la nouvelle réglementation, des truies gestantes sont toujours coincées dans des cages, incapables de se retourner, et souffrent d’escarres et de blessures aux pattes. Les porcs ont les dents arrachées et la queue coupée pour « éviter qu’ils ne blessent » leurs compagnons de malheur. Des poulets dont la croissance a été accélérée ont atteint un tel poids que leurs pattes ne peuvent plus les porter.
Parce qu’il faut gagner toujours plus d’argent, parce qu’il faut produire plus et toujours plus, certains ont fait des animaux de ferme des martyrs confinés à vie. Et pour se donner bonne conscience, certains ont décrété qu’ils n’étaient dotés ni de conscience, ni d’intelligence.
La période de confinement que nous vivons actuellement est une opportunité vers le changement. La pandémie actuelle doit nous inciter à repenser notre rapport aux animaux. Les emprisonner dans des élevages concentrationnaires est inacceptable et favorise la propagation de virus et de maladies mortelles (grippe aviaire, encéphalopathie spongiforme bovine, peste porcine,…), dont souvent les décideurs nient la cause réelle. Comme le dit le Docteur Yvan Beck : Quel que soit le problème, la seule réponse des pays riches fut d’isoler les foyers et d’allumer des charniers pour brûler sans état d’âme des centaines de milliers de cadavres d’animaux sacrifiés au nom d’un système économique aveugle… La mise en cause des racines du mal ne fut pas soulevée.1
1 En période de crise sanitaire dans les élevages, peut-on accepter d’un point de vue éthique de sacrifier des millions d’animaux sans aucun respect ni pour leur vie, ni pour leur souffrance, quand on voit comment, dans certains pays, on les tue trop souvent, brûlés vifs ou enterrés vivants? Yvan BECK, Grippe aviaire, ce que l’on dit et ce que l’on ne dit pas in La Libre, 16 mars 2006.
Par ailleurs, les crises sanitaires liées aux élevages concentrationnaires ont un coût pour le contribuable qui en paie la note.
La déforestation et la désertification sont d’autres conséquences du nombre croissant de terres cultivées pour nourrir ces animaux confinés puisque la plus grande partie de ces terres sert à nourrir les animaux destinés à la consommation humaine. L’élevage intensif est donc étroitement lié à l’agriculture intensive, grande utilisatrice de pesticides.
1 En période de crise sanitaire dans les élevages, peut-on accepter d’un point de vue éthique de sacrifier des millions d’animaux sans aucun respect ni pour leur vie, ni pour leur souffrance, quand on voit comment, dans certains pays, on les tue trop souvent, brûlés vifs ou enterrés vivants? Yvan BECK, Grippe aviaire, ce que l’on dit et ce que l’on ne dit pas in La Libre, 16 mars 2006.
Alors que plusieurs pays d’Europe sont en confinement général pour enrayer l’épidémie de Covid-19, le transport d’animaux vivants, issus le plus souvent des élevages industriels, au sein de l’Union Européenne et vers des pays tiers se poursuit, provoquant de graves souffrances pour les animaux (manque d’eau, de nourriture, confinement dans des camions surchargés couverts de déjections, pas d’aire de repos,…). De très longs retards ont été signalés aux frontières et de multiples situations mettant à mal le bien-être et la survie des animaux ont été signalées :
- des véhicules de transport d’animaux refusés d’entrer en Croatie ;
- des files d’attente de 40 km à la frontière entre la Lituanie et la Pologne ;
- des files d’attente de 65 km à la frontière entre l’Allemagne et la Pologne (côté allemand), avec des temps d’attente jusqu’à 18h ;
- des files d’attente entre la Bulgarie et la Turquie, où des transporteurs ont déclaré mettre 3h pour avancer de 300 mètres.2
En France, 38 ONG ont demandé à l’Europe de réagir. Ici, en Belgique, S.E.A. a lancé une campagne de lettres-pétitions destinées à la ministre du Bien-être animal afin, qu’en période de confinement, l’envoi des poules pondeuses vers les abattoirs soit reporté.3
Etant donné les contraintes provoquées par l’épidémie de Covid-19, la situation en Europe ne peut plus garantir le respect du droit européen en ce qui concerne le transport d’animaux d’élevage, notamment vers les pays hors Europe.
Par ailleurs, en se rendant dans les élevages industriels de poules pondeuses, S.E.A. est témoin du départ des poules vers l’abattoir. Malgré les mesures de confinement et d’hygiène imposées, Il est bien évident que des contacts ont lieu entre les « ramasseurs » de poules et avec les transporteurs lorsque le camion de l’abattoir vient charger ces malheureux animaux.
En cette période de confinement, de nombreuses personnes souffrent d’un sentiment d’inutililté, d’anxiété voire de dépression. Le confinement limite considérablement la possibilité d’avoir des choix mais pour l’être humain il n’est que temporaire ; pour les animaux il est sans issue si nous n’agissons pas.
Cette difficile période est une opportunité vers le changement. Nous invitons chaque citoyen à réfléchir aux conditions de « vie » dans les élevages industriels concentrationnaires et à agir avec nous, agir en tant que consommateurs responsables, agir également en relayant nos campagnes de lettres auprès des décideurs, agir en sauvant des poules de l’abattoir, par exemple. La période que nous vivons peut nous aider à réfléchir sur le sort que nous réservons aux autres espèces.
L’écrivain Isaac Bashevis Singer s’exprimait en ces termes : Personnellement, je ne crois pas qu’il puisse y avoir de paix dans ce monde tant que les animaux seront traités comme ils le sont aujourd’hui ».
Solange T’KINT
ASBL S.E.A. – Suppression des Expériences sur l’Animal
0497 62 00 89
2 https://www.l214.com/enquetes/2020/transport-veaux-irlande-pays-bas/
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