Quand la réglementation nuit à notre santé

Contribution aux cahiers de la colère et de l’espoir

Jeudi 12 Décembre 2019 Andre MENACHE

Contre l’expérimentation : André Ménache, vétérinaire; conseiller scientifique pour l’ASBL Suppression des expériences sur l’animal (SEA)

Le 6 décembre Le Monde publiait une tribune intitulée « Le Téléthon finance-t-il des expériences sur les animaux ? »
Citons les premières phrases qui suivent ce titre : « Oui. Il s’agit d’ailleurs d’une obligation légale en France et au niveau européen. L’efficacité et l’absence de toxicité d’un nouveau traitement médical doivent être testées sur deux races d’animaux différents avant de l’expérimenter sur l’homme, comme l’explique l’association AMF-Téléthon sur son site. « 


On nous explique ainsi très clairement que tester un médicament destiné à l’homme repose sur une obligation réglementaire. Et qui oserait mettre en question une telle exigence qui semble a priori tout à fait défendable ? En fait, cette exigence date de la fin de la deuxième guerre mondiale et, plus précisément, suite au procès des médecins à Nuremberg fin 1946.
Est-il concevable d’affirmer que tester un médicament sur des rats, des chiens ou des singes en 2019 peut s’avérer incohérent considérant nos connaissances actuelles dans le domaine du vivant ?

Selon la haute autorité de sécurité sanitaire aux Etats-Unis, la FDA, sur dix médicaments ayant passé avec succès les tests requis sur des animaux, neuf échoueront au cours des essais cliniques impliquant des humains (par absence d’efficacité ou présence d’effets secondaires non identifiés chez les animaux), soit un taux de fiabilité de 10 %. Par contre, les technologies in vitro dont nous disposons à l’heure actuelle (organes sur puces, cultures cellulaires, microfluidique…), pour être acceptées au niveau réglementaire, doivent viser un taux de fiabilité de 85 à 90 %. Aussi, une stratégie basée sur une batterie de tests in vitro à partir de matériel humain aurait davantage de pertinence que la poursuite de tests toxicologiques sur animaux.

L’industrie pharmaceutique est tout à fait consciente que les nouvelles technologies sont plus performantes que les tests sur des animaux et commence tout doucement à les appliquer dans leurs programmes de développement de nouveaux médicaments. Cependant, tout comme l’industrie chimique, elle ne se montre pas empressée pour remplacer l’expérimentation animale par ces nouvelles méthodes pour deux raisons principales. La première est qu’il faut soumettre les nouveaux tests à un processus très chronophage (sept ans en moyenne) pour valider leur efficacité. Par contre, les tests sur des animaux n’ont jamais eu à subir un tel processus.

La deuxième raison est que choisir l’espèce animale la plus “propice” pour tester les produits est une astuce acceptée par les agences de sécurité sanitaire et, par conséquent, un avantage que les industriels ne sont pas encore prêts à lâcher. En ce sens, la réglementation est très libérale car elle exige à minima que tout médicament soit testé sur un “rongeur” et “un non rongeur”. En l’occurrence, l’industrie pharmaceutique peut choisir parmi plusieurs souches de rats ou de souris pour satisfaire à l’exigence du rongeur et ensuite le chien ou le singe pour satisfaire à celle du non rongeur.

Ceci peut paraître rigoureusement scientifique à n’importe quel profane. Mais, étant donné qu’aucune espèce n’est un modèle biologique pour une autre, quel que soit l’animal choisi, le résultat demeurera moins rigoureux scientifiquement qu’une batterie de tests in vitro validés.

L’opinion publique est de moins en moins dupe mais certainement encore peu informée. Pendant des décennies, elle a accepté l’expérimentation animale comme étant un mal nécessaire. Mais la société civile évolue, en 2019, il est temps de mettre sur la sellette cette petite phrase qui tient du chantage « C’est votre chien ou votre enfant ». La réalité est tout autre et le sacrifice de chiens (par ailleurs admirés pour leur courage quand ils assistent les pompiers pour sauver des vies) n’empêche pas la mise en danger de la santé des enfants par des produits mal évalués.

Commençons par demander à nos élus la création d’une Commission d’enquête parlementaire pour faciliter la transition vers une recherche sans animaux. Nous avons attendu 70 ans de trop.
Tribune soumise par André Ménache, Vétérinaire et conseiller scientifique de l’association Antidote Europe ET Dr Roland Cash, Médecin, consultant en économie de santé et santé publique ET Dr Sandrine Loublier, Professeur agrégée de biochimie et génie biologique.

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