LA LIBRE OPINION DE SEA PROJET BLOQUE PAR LA MINISTRE TELLIER
Projet d’arrêté qui vise à protéger les animaux de laboratoire : « Nous sommes profondément choqués par les pressions qui ont été exercées sur la ministre du Bien-être animal »
Opinions
Publié le – Mis à jour le
Afin d’encourager les alternatives, le projet d’arrêté gelé proposait de taxer l’expérimentation animale et de prévoir un financement en faveur de méthodes innovantes sans animaux. Cela n’aurait pu que satisfaire les amis des animaux qui en tant que contribuables financent largement les laboratoires d’expérimentation.
Une opinion du Docteur Edgard Vandeput, psychiatre, d’André Ménache, vétérinaire et de Solange t’Kint, tous membres de l’ASBL Suppression des Expériences sur l’Animal.
On connaissait déjà « Une Vérité qui dérange », voici maintenant « Une Loi qui dérange ».
Depuis des années, S.E.A. (Suppression des Expériences sur l’Animal) dénonce, tant pour des raisons morales que scientifiques, les souffrances infligées aux animaux dans les laboratoires. En cela, l’ASBL se fait la porte-parole des citoyens.
Si l’on se réfère à l’un des plus grands sondages relatif à l’utilisation des animaux à des fins expérimentales commandé par la Commission européenne, 68 % des Européens seraient opposés à la recherche utilisant des animaux.
En Wallonie, le Bien-être animal n’est plus considéré comme un problème mineur . Le Code wallon du Bien-être animal est entré en vigueur le 1er janvier 2019, le chapitre VIII étant consacré aux expériences sur animaux.
Un projet d’arrêté qui permettrait de protéger réellement les animaux
La mise en application de ce chapitre VIII dépendant d’un Arrêté d’exécution du Gouvernement wallon, Madame Céline Tellier, ministre du Bien-être animal, a donc élaboré, avec son administration, un projet d’arrêté encadrant l’expérimentation animale et l’a soumis de façon tout à fait démocratique aux différentes parties concernées : universités, secteur privé, associations de protection animale.
Ce projet d’arrêté permettrait de protéger réellement les animaux et encouragerait l’utilisation des alternatives par des contrôles enfin efficaces dans les laboratoires.
Comme cela avait été le cas lors de l’élaboration du Code wallon du ministre Di Antonio, la réaction des universités ne s’est pas faite attendre. Une motion relative à l’Avant-projet d’Arrêté sur les animaux d’expérience (…) a été envoyée à l’Administration du Ministère du Bien-être animal. Cette motion, disent les universités dénonce « un parti pris qui repose sur une volonté, à peine voilée, de rendre impossible le recours à l’utilisation d’animaux d’expérience tant les nouvelles mesures sont impraticables ». (…) « il apparaît clairement que l’ensemble des modifications apportées par l’avant-projet d’arrêté relève principalement d’un climat de suspicion particulièrement alarmant à l’égard de tous les acteurs intervenant dans le domaine de l’expérimentation animale ». « si cet avant-projet d’arrêté devait être adopté en l’état, il mettrait en grave péril le secteur de la recherche en Wallonie, tant les nouvelles règles proposées sont complexes et dénuées de fondement scientifique pouvant ainsi décourager tout nouvel investissement dans la recherche biomédicale ».
Incompréhensions
Indépendamment de l’argument essentiellement économique avancé ici par les expérimentateurs sur animaux, S.E.A. ne comprend pas pourquoi ces expérimentateurs qui, régulièrement, disent leur volonté de diminuer l’expérimentation animale, assurent qu’ils sont soucieux de leur bien-être et disent également pratiquer une politique de transparence, exercent de telles pressions dès lors qu’il est proposé de veiller à l’amélioration du bien-être des animaux dans les laboratoires.
Et ces pressions sont telles que la ministre du Bien-être animal, Céline Tellier a dû geler la réforme sur l’expérimentation animale, le temps qu’un comité wallon sur le sujet se mette en place. »Ce comité devrait être instauré dans la deuxième partie de 2021 et le nouveau mode de recours aux animaux d’expérience devrait être mis en application dans le courant de l’année 2022 ou 2023 maximum « (…) « L’idée, poursuit Céline Tellier, c’est d’avoir un équilibre entre les personnes qui pratiquent ou sont impliquées dans l’expérimentation et celles qui peuvent porter un regard de spécialistes du bien-être animal : vétérinaires, etc. » Selon S.E.A., la grande crainte des universités est que la protection animale puisse avoir un droit de regard sur les pratiques en matière d’expérimentation animale. Dans le projet d’arrêté, Madame la ministre Tellier et son administration avaient prévu d’introduire deux représentants de la société civile au sein des commissions d’éthique (la protection animale aurait pu y être représentée notamment par des scientifiques ayant une connaissance des méthodes alternatives n’utilisant pas d’animaux).
Certains expérimentateurs ont remis en cause le projet d’arrêté qui « viserait notamment à réduire et, à terme, remplacer les modèles animaux par des méthodes alternatives ».
Or, la ministre ne fait que se conformer en cela à la directive européenne 2010/63 qui recommande que « Les États membres veillent, dans toute la mesure du possible, à ce que soit utilisée, au lieu d’une procédure, une méthode ou une stratégie d’expérimentation scientifiquement satisfaisante, n’impliquant pas l’utilisation d’animaux vivants ; et que faute par un État membre de l’Union européenne de mettre en œuvre les dispositions du droit communautaire, sa responsabilité peut être engagée par la Commission européenne. »
La mise en oeuvre de cette directive ne serait possible que par la mise en place de contrôles efficaces dans les laboratoires, tant par la réforme des commissions d’éthique que par des contrôles vétérinaires indépendants.
Taxer l’expérimentation animale et prévoir un financement en faveur de méthodes innovantes sans animaux
Afin d’encourager les alternatives, le projet d’arrêté proposait de taxer l’expérimentation animale et de prévoir un financement en faveur de méthodes innovantes sans animaux. Cela n’aurait pu que satisfaire les amis des animaux qui en tant que contribuables financent largement les laboratoires d’expérimentation.
Il faut savoir que l’expérimentation animale engendre de nombreux coûts, notamment par le nombre d’animaux utilisés, par les conditions d’élevage ainsi que par la longueur des expériences. Les méthodes alternatives présentent de nombreux avantages, dont, de manière non négligeable, une économie de temps et une rentabilité augmentée.
S.E.A. est profondément choquée par les pressions qui ont été exercées sur la ministre du Bien-être animal au point que son projet de réforme sur l’expérimentation animale soit bloqué jusqu’en 2022-2023, le but étant, sans aucun doute, pour les expérimentateurs sur animaux d’exclure la protection animale des débats.
Des pressions s’étaient également exercées lors de l’élaboration du Code wallon du ministre Di Antonio (2017-2018) et en région de Bruxelles-Capitale (en avril 2019) quand des parlementaires bruxellois avaient soumis une proposition de résolution afin de réduire l’utilisation des animaux dans les laboratoires de 30 %. Cette levée de bouclier des expérimentateurs sur animaux avait empêché que cette résolution d’aboutir.
Mais nous sommes de plus en plus nombreux à dénoncer les souffrances infligées aux animaux dans les laboratoires et à demander légitimement que des méthodes de recherche fiables et modernes soient utilisées. Notre système représentatifs nous permet de choisir nos porte-parole. Ils sont notre voix et nous les remercions de répondre à nos attentes, en cela nous soutenons la ministre Tellier et son projet d’arrêté initial. Les élus doivent pouvoir exercer leur mandat et veiller à ce que les lois et directives soient réellement appliquées. Les en empêcher relèverait de pratiques anti-démocratiques.
Nous le savons, toute période de transition et d’innovation donne lieu à des résistances. Comme le dit Florence Burgat, philosophe et directrice de recherche à l’INRA, à propos d’une tribune en faveur de l’expérimentation animale cosignée par 400 chercheurs : Comme toute période transitoire, celle-ci sera marquée par des conflits et des manœuvres de diversion. Outre que toute méthode nouvelle a du mal à s’imposer par rapport à celles qui sont pratiquées depuis longtemps, que l’on maîtrise et que l’on s’est employé à sophistiquer, le processus de substitution se heurtera à la réglementation en ce qui concerne les tests et les expertises (changer de réglementation demande du temps), mais aussi, comme le montre la tribune, à l’hostilité (…).
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